Japon décembre 2005
Installation de Noël à Shinjuku Park Tower
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Nos 35h vues du
Japon
Shinjuku, le quartier des hommes
d'affaires dans la ville immense de Tokyo (30 millions d'habitants),
est rempli de gratte-ciels, à qui mieux mieux impressionnants et
grandioses.
L'un d'eux, Shinjuku Park Tower, est peut-être le plus connu dans le monde
européen. Construit en 1994 par l'architecte Kenzo Tange, il a une
hauteur de 233m, sur 52 étages, où il abrite des magasins, des restaurants,
des galeries artistiques - jusqu'au huitième étage, puis jusqu'au 37ème il
est peuplé par des bureaux, les derniers 14 étages étant occupés par le plus
cher hôtel de Tokyo, Park Hyatt Hôtel.
Pourquoi cet intérêt pour la partie "affaires" de Tokyo?
Parce que j'y
étais invité à exposer mes colonnes pour un mois, pendant les fêtes
de Noël et de Nouvel An.
Pas mal, non? ...
Si vous suivez régulièrement l’évolution de mon site,
vous savez que cet été j’ai eu comme invitée à la maison une artiste
japonaise, Mariyo Yagi, avec qui on a réussi à créer une œuvre commune, moi
avec les colonnes et elle avec l’idée de les toronner.
De retour au Japon, elle a montré notre collaboration à son amie Hiroko
Sakomura, dynamique organisatrice d’expositions artistiques, qui a su
mettre en évidence un projet original et gagner un concours pour
l’installation de Noël ayant comme lieu le plus fameux gratte-ciel de
Tokyo, Shinjuku Park Tower.
Mariyo m’a tenu au courant du déroulement des négociations, mais
jusqu’au dernier moment, j’étais très sceptique… Quand elle m’a annoncé
qu’on a gagné !!! …. la panique a commencé… le temps qui me restait pour
toutes les préparations était court, mes colonnes n’étaient pas aussi en
forme que je l’aurais souhaité, mon souffleur, indispensable outil, ne
marchait pas là-bas, à cause de la différence de voltage... En plus, comme
Mariyo voulait enrober les colonnes avec une bande adhésive colorée qu’elle
n’a pas trouvé au Japon, je me suis chargé d’apporter une jolie bande
autocollante, fournie aimablement par l’entreprise « Enseignes François ».
J’ai fait un gros paquet où j’ai entassé les 6 colonnes roses, une grosse
blanche et les 4 colonnes grises, quelques mousquetons et plusieurs
rouleaux de corde. Il était bien lourd, mais je me suis débrouillé pour le
porter à l’aéroport de Paris, d’où il est parti vers le Japon, quelques
semaines avant nous. Le reste des jours est passé vite, avec beaucoup de
choses à préparer, et nous voila, Diana et moi, prêts à partir vers le
Soleil Levant. 12 heures de vol dans un avion bien plein de japonais… et
on est arrivé à Narita, l’aéroport situé à une heure de Tokyo.
Le jour suivant, on a découvert le lieu d’exposition du quartier Shinjuku, le fameux gratte-ciel Park Tower, dont le grand hall dispose
d’un atrium s’étendant sur 3 niveaux…
Que rêver de mieux ? Jamais dans leur vie, mes colonnes n’avaient
vu un espace si propre et moderne. L’idée était de les dresser sous la
forme d’un arbre qui soit à la fois original et joyeux. Mariyo pensait
habiller chaque colonne de bandes colorées, puis peindre le pied de la
colonne blanche pour lui donner grâce et fantaisie.
Mais d`abord, on a dû
aller chercher le souffleur à Yokohama, où se trouve la filiale japonaise de Nilfisk. Yoshiko, la gestionnaire financière de cette aventure, a été une
très bonne hôtesse, elle a préparé notre rendez-vous avec soin.
Une petite parenthèse, en circulant dans le métro, ma curiosité a été
attirée par l’accoutrement d’une femme de ménage équipée d’un petit
aspirateur en sac a dos… Je n`ai pu m’empêcher de l`aborder, pour comprendre
les subtilités de sa machine.
Après
avoir obtenu le bon appareil, on est allé tous à Park Tower, où
nous avons été reçus par M. Suzuki et son équipe chargée de fournir
l’intendance. J`ai alors retrouvé le colis avec les colonnes, que
j`ai défait avec beaucoup d`émotion.
Tout était là… les colonnes, les mousquetons, la corde…
j`étais tout fier de pouvoir prouver mes compétences et d`épater les
japonais avec mes gonflables. Ils n`ont jamais vu ça ! Très curieux mais
extrêmement polis, ils m`ont regardé sortir un par un les serpents et leur
donner du volume. C`était comme un rituel!
On a reçu
aussi les précieux brassards, indispensables objets qui prouvaient
l'autorisation de travailler dans le grand hall de Park Tower, brassards
qu'on devait retourner chaque soir. On nous a bien mis en garde contre leur
perte: leur valeur était inestimable.
Bon… et
maintenant que nous avons tout ce que nous faut, on peut commencer le
travail ! Mariyo concevait soigneusement ses modèles de spirales, Diana
calculait la division optimale de la colonne pour coller les bandes,
pendant que moi, je surprenais les badauds en dressant çà et là quelques
colonnes.
Les gens passaient vers leurs
bureaux, ou sortaient en pause et me regardaient avec intérêt et
curiosité. On ne voit pas chaque jour un mec, qui seul avec ses deux
bras, érige en rigolant des grands tubes en plastique...
Hiroko, celle qui a rendu possible toute
cette folie, a trouvé le temps entre ses rendez-vous de venir nous voir
travailler… et c'était tellement intéressant qu'elle a participé à
l'action.
De plus, un jeune japonais, Hideyuki, a été affecté à la résolution des petits problèmes qui
pouvaient apparaître, et à l’apprentissage des subtilités de
gonflage… ce devait être lui à qui incomberait
l’entretien des colonnes après notre départ.
Pendant les jours de travail, «le client», ç’est à dire Tokyo Gaz, a
envoyé plusieurs fois son staff pour regarder de plus près
l’avancement des travaux.
On a mis 4 jours pour personnaliser
chaque colonne des motifs de Mariyo et les peindre avec de la
peinture fluo, visible sous lumière noire.
Le 5ème jour, une nacelle élévatrice est arrivée avec une
équipe de 6 personnes pour positionner les suspentes et dresser les
colonnes. Au début j’ai rigolé…
dans mon champ j’érigeais tout seul mes colonnes, sans aucune aide, et
maintenant j’avais à la fois à ma disposition, une équipe entière, plus
leur machine.
Evidemment j’étais outillé de mes cordes et de tout ce qu’il faut pour
la suspension.
Mais quand j’ai vu
le professionnalisme et l’exactitude avec laquelle ils travaillaient… j’ai
cessé de rigoler! Ils
avaient un superbe fil d’acier, et après avoir bien étudié les plans, ils
ont commencé à poser le fil au plafond. Mon cœur de contrôleur de sécurité
a tressailli de joie. Tous les
ouvriers avaient leurs casques, la nacelle était conforme, ils ont fait
toutes les liaisons selon les règles!
Et tout ça, vite, sans trop parler
et en ordre. Bravo!
Quand les
fils ont été mis en place, on a accroché la grosse colonne blanche au
bout de la grue, et… en avant !
Avec une bonne
collaboration entre les ouvriers, beaucoup de professionnalisme, en quelques minutes, toute la structure
était debout.
L’arbre est apparu devant
nous, imposant et majestueux.
C'était un moment émouvant, intense,
quand l'ensemble de l'équipe a prouvé tout son savoir faire.
Il restait seulement à
fixer les réflecteurs ultraviolets et à éclairer les colonnes la nuit pour
découvrir le superbe dessin floral fait par Mariyo sur le pied de l’arbre.
J'étais content, l'arbre avait l'air bien, les colonnes roses habillées
avec la bande adhésive donnaient une ligne joyeuse à la
composition, et les lumières produisaient un effet étonnant.
Mais comme
chaque chose a une partie moins bonne… j'avais un souci… deux des
colonnes roses se dégonflaient trop vite, ça imposait à Hideyuki de
grimper souvent sur l'échafaudage, pour les gonfler. En plus, il utilisait un
outil très lourd et difficile à manoeuvrer.
Chaque 4 heures, le pauvre garçon montait à l'échelle pour redonner du lustre aux colonnes.
Mais peut-être est-ce plus intéressant comme ça! En effet, mes
œuvres sont faites pour être éphémères, elles ont leur
vie propre, elles bougent… elles flottent. Une posture fixe
pendant un mois n'est pas leur spécificité. En se dégonflant, elle
offrent tout le temps une nouvelle image; mon arbre était comme
le vent, comme les êtres humains, comme la vie, toujours les mêmes,
mais toujours différents…
L’autre partie de mon travail consistait à aménager une exposition de
photographies avec mes colonnes, pour faire découvrir d’autres aspects de
cette activité.
On a choisi une dizaine des photos parmi les plus représentatives et on les
a arrangé sur des chevalets, devant lesquels les organisateurs ont aménagé
un coin pour collecter les dons pour l'UNICEF, avec des candies, roses comme
les colonnes.
Comme ça, j'ai
eu la surprise de voir ma biographie écrite en japonais, dans une brève
présentation du "grand artiste français"!
C'est rigolo de voir toute ta vie mise sur papier, sans rien
comprendre...
Bref, on a beaucoup travaillé, Mariyo, Diana et moi, entourés par les
aimables japonais, et sans trop avoir de temps pour visiter Tokyo. Une
fois les colonnes debout, gonflées et bien éclairées, notre tâche était
accomplie et on a pu quitter Park Tower, pour jouer les touristes à
Tokyo puis Kyoto.
Pas sans regrets, et un peu triste, j’ai
laissé mes colonnes toutes seules dans l’immense atrium, en espérant
qu’elles se comporteront bien, et que j'aurai toutes raisons d'en être
fier.
Au revoir Shinjuku Park Tower...
Pour le Nouvel
An, Mariyo devait apporter des changements à l’arbre, en ajutant deux de
ses torons. Elle a fait ça bien, comme vous pouvez voir sur les photos.
Voilà, mon travail au Japon!
C'était une expérience étonnante et
enrichissante, qui m'a bien sollicité, mais en même temps m'a dévoilé
des nouveaux potentiels artistiques, a montré les colonnes dans toute leur
beauté, même tellement éphémères... et surtout, a réjoui les
coeurs de milliers de japonais par l'inédit de l'installation.
Plus de photos pour les curieux:
►
Shinjuku Park Tower
Les lieux qu'on a visité, les impressions personnelles sur le Japon,
vous les trouverez sur une autre page:
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Nos 35h vues du Japon
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